LE DROIT À LA FRAÎCHEUR

ET SI LA CHALEUR IMPOSAIT DE NOUVEAUX MODES DE VIE PARISIENS ?

En 2050, Paris doit désormais apprendre à vivre dans des conditions climatiques extrêmes, soumise une partie de l’année à des épisodes caniculaires. Le reste du temps, la ville se prépare à l’arrivée du « Dôme », cette vague de chaleur contre laquelle on fait corps collectivement.

© CAUE de Paris - Jean-Baptiste Vicquelin

Le Droit à la fraîcheur s’est imposé comme droit inconditionnel du bien-être du vivant. Pendant le jour, il s’agit d’éviter les décès des plus fragiles. Pendant la nuit, il va de pair avec le droit à un sommeil réparateur, mis en péril par la chaleur nocturne. L’objectif : s’assurer individuellement et collectivement de garder la tête suffisamment froide pour prendre les décisions adaptées afin d’affronter la vague de chaleur.

S’ensuivent des transformations des infrastructures et des modes de vie pour permettre à chacun·e de jouir de ce droit. 

La première conséquence notable est un bouleversement des rythmes dans la capitale qui voit un ralentissement de ses activités urbaines lors des pics de chaleur de l’après-midi. La ville s’inspire de ses voisines espagnoles : on vit tôt le matin et tard le soir. Dans l’intervalle, on se calfeutre chez soi pour télétravailler ou on profite des îlots de fraîcheur, à commencer par les bords de Seine et les espaces de baignade offerts par de nouvelles infrastructures urbaines. C’est toute une ville parallèle qui se développe dans la fraîcheur des réseaux souterrains. Couloirs du métro et catacombes sont aménagés pour constituer des refuges, des espaces de sociabilité et de loisir durant les temps apaisés de l’après-midi.

L’habitat et les mobilités se transforment pour s’adapter à ces nouvelles conditions climatiques. On privilégie des modes de déplacement de proximité, lents et économes en énergie physique. Les logements se reconfigurent pour permettre la ventilation naturelle, l’installation de systèmes de rafraîchissement partagés et l’accès aux toits, formant une canopée végétale sur laquelle on circule pour éviter la chaleur au sol dans les zones encore bitumées.

La politique de végétalisation s’oriente sur la lutte contre les îlots de chaleur urbains, la constitution de refuges et de points d’eau pour les humains comme les animaux. En effet, le Droit à la fraîcheur concernant l’ensemble du vivant parisien, on n’oublie pas les espèces autres qu’humaine qui peuvent utiliser les espaces verts et bleus offerts par la ville.

Les mois précédents l’arrivée du Dôme, Paris se prépare en économisant et en stockant l’eau dans des réservoirs souterrains placés sous haute surveillance et d’autres lieux gardés secrets. Il s’agit de garantir un accès équitable à cet or bleu pendant l’épisode caniculaire, en imposant aussi des limites d’utilisation sur les eaux disponibles dans la ville (eau potable, eau non potable, eaux pluviales et eaux usées) en fonction des usages.

▌FRAGMENTS ISSUS DE CE FUTUR

Échelles de la ville, du quartier, du foyer/de l'invidividu

→ Le Droit à la fraîcheur
Le Droit à la fraîcheur concerne l’ensemble des habitant·e·s parisien·ne·s (humains et animaux) et implique que chacun·e doit pouvoir accéder à des conditions d’existence permettant de maintenir sa température corporelle à un niveau confortable. En vertu de ce droit, les personnes ne disposant pas des moyens nécessaires pour échapper à la chaleur se voient accompagnées par une variété d’acteurs pour trouver des solutions : technologies portatives et vêtements de climatisation corporelle...

→ Les îlots de chaleur urbains à condensation
Pour diverses raisons techniques, certains quartiers n’ont pas pu être aménagés de manière assez efficace et forment des îlots de chaleur atteignant des températures records. Peu à peu désertés, ils deviennent des zones-ressource de collecte d’eau par condensation. On couvre la végétation et certains bâtiments avec de grandes bâches qui créent de la condensation ; l’eau ainsi produite est récoltée chaque jour par des « agents de rosée » de la Ville de Paris.

→ L’accès aux espaces verts et bleus
La Ville permet l’accès autonome des espèces animales aux parcs, jardins, forêts, mares et cimetières parisiens à n’importe quelle heure du jour et de la nuit en période de Dôme. Chiens, chats, renards, écureuils, pigeons, etc. peuvent pénétrer dans ces espaces de fraîcheur même lorsqu’ils sont clos, grâce à des passages dédiés.

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INFORMATIONS

SÉLECTION DE TENDANCES ET SIGNAUX
Sources d’inspiration dans le présent pour ce futur...

 

→ Les vagues de chaleur constituent à ce jour la première source de vulnérabilité sanitaire et sociale du dérèglement climatique de Paris. Lien

 

→ La canicule est définie comme un niveau de très fortes chaleurs le jour et la nuit pendant au moins trois jours consécutifs. Elle se caractérise à Paris par des températures dépassant les 31 °C le jour et 21 °C la nuit. Lien

 

→ Selon une étude danoise publiée dans la revue One Earth, la hausse des températures causée par le réchauffement climatique pourrait nous faire perdre jusqu’à 58 heures de sommeil par an d’ici 2099. Lien

 

→ Certaines caractéristiques urbaines (rues étroites et encaissées, végétation peu abondante, orientation des rues au regard des vents dominants) accentuent localement le phénomène d’îlot de chaleur urbain. Densité du bâti, concentration des activités, minéralisation des espaces, imperméabilisation des sols, tous ces éléments contribuent à rendre les villes plus vulnérables face aux vagues de chaleur. Lien

 

→ Les villes regroupent de grands centres d’activités humaines qui dégagent de la chaleur en complément des paramètres environnementaux. On peut citer la circulation motorisée, les activités économiques (rejets d’air chaud des pressings, climatisation) ou encore les réseaux urbains, comme le réseau de chaleur situé sous la chaussée et dont une partie de la chaleur réchauffe l’air au niveau de la rue. Lien

 

→ L’étude sur les îlots de chaleur urbains (ICU) de Paris publiée en juillet 2017 a montré les bénéfices d’une végétalisation multi-strates (pelouses, arbustes, arbres, toitures végétalisées) sur le rafraîchissement local. Des massifs d’arbres pourront constituer un canevas de petites forêts urbaines à Paris d’ici 2050, véritables refuges de fraîcheur durant les journées chaudes. Lien

 

→ Les revêtements de trottoir ont une durée de vie d’environ 20 ans, il y a donc urgence compte tenu du réchauffement climatique à rechercher des revêtements qui accumulent le moins de chaleur possible. L’asphalte (quasi noir) sur béton utilisé sur 82 % des trottoirs parisiens n’est pas la meilleure solution, car il chauffe rapidement et augmente le stockage de la chaleur par le béton. Lien

 

→ Paris a la particularité de disposer de plusieurs réseaux d’eaux : eau potable, eau non potable, mais aussi eaux usées et pluviales dans le réseau d’assainissement des égouts de Paris. Lien

 

→ Un « dôme de chaleur » a frappé fin juin 2021 le sud-ouest du Canada et le nord-est des États-Unis : la température à Vancouver est montée à 47 °C, soit 5 °C de plus que le précédent record, et presque 30 °C de plus que les températures moyennes en juillet. Lien

 

→ Alors que des chaleurs extrêmes et des feux de forêt impressionnants touchent la capitale grecque, la municipalité d’Athènes s’est dotée d’une Chief Heat Officer, (« haut responsable de la chaleur »), afin de conduire et d’animer la réponse aux phénomènes de fortes chaleurs. Une action déjà reproduite à Miami et qui pourrait inspirer de nombreuses autres municipalités à travers le monde. Lien

 

→ Les « filets à nuages », ou capteurs de brouillard, sont des collecteurs qui permettent de piéger les gouttelettes du brouillard dans les mailles fines d’un filet, puis de les faire ruisseler le long de gouttières avant de les recueillir dans des réservoirs alimentant un réseau de canalisations. Ces systèmes sont surtout utilisés dans les régions arides touchées par des brouillards épais (désert d’Atacama au Chili, Anti Atlas au Maroc…). Lien

 

Texte d'inspiration proposé par le studio Design Friction pour nourrir la démarche de prospective créative « Vers Paris 2050, affronter ensemble les défis de notre siècle ». Ce texte imagine un futur possible pour Paris à l’horizon 2050, selon l’impact des différents chocs qui pourraient survenir (changements climatiques et catastrophes naturelles, crise de la biodiversité, raréfaction des ressources, etc...). Il vise à inspirer les contributeurs de la démarche et à nourrir les débats.

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